Tendresse nécessaire

Casa Susanna  de Sébastien Lifshitz

Une petite maison dans les bois, dans les années 50 et 60, en pleine campagne américaine, un des premiers lieux de rencontre des réseaux clandestins des personnes travesties (j’utilise ce terme car c’est la manière de se définir des personnes de l’époque).

Entre les mains du documentariste Sébastien Lifshitz, l’histoire est racontée de manière douce et profondément humaine car s’appuyant sur les témoignages des proches et de certains membres de ce qui s’appelait alors la Casa Susanna. Elle était un lieu de rencontre pour des personnes souhaitant être elles-mêmes d’une autre manière, des hommes se travestissant en femmes. A l’époque, ceux que l’on appelle les « travestis », comme les homosexuels et ceux qui disposeraient d’un soi-disant lien avec le communisme sont criminalisé.e.s. Ce lieu est ainsi un refuge.

Mais ce que montre le documentariste, c’est majoritairement la joie de pouvoir s’exprimer, d’être soi-même, et de se réunir. Ce sont les belles relations qu’entretenaient des personnes qui devenaient libres de disposer de leurs corps, mais aussi les relations parfois compliquées avec leurs épouses, alors que certaines venaient aussi à la Casa Susanna.
Mais je ne souhaite pas m’étendre sur le contenu pour laisser une part de découverte.

On sent une profonde sensibilité chez le documentariste, qui donne vie aux témoignages en s’appuyant sur des archives, en prenant son temps, en donnant un air poétique aux images.
Une profonde tendresse émane de ce film. Un entrelacement délicat du spectateur.trice, qui l’amène à s’émouvoir sur ce qui aurait pu le ou la déranger dans un autre contexte.

La transidentité a une histoire, qu’il est important de raconter, mais aussi de connaître.
Alors que en 2015, un jeune trans sur trois a fait une tentative de suicide, alors que des personnalités ouvertement transphobes comme Dora Moutot ou Marguerite Stern sont encore interviewées sur des chaînes de télévision publiques, et que l’extrême droite monte en Europe, la tendresse de ce documentaire est nécessaire.

Nathan Lesbats.

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